Revista da TV5 fala de Cassandra Rios
Octave Bonnaud, jornalista francês que trabalha para a TV5, entrevistou Hanna Korich sobre o documentário Cassandra Rios – a Safo de Perdizes e fez uma bela matéria a respeito.
Está em francês, mas quem não lê o belo idioma pode acionar o google translator para ter uma ideia de como ele realça o papel de pioneira de Cassandra, veja aqui ou leia abaixo.
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La seconde vie de Cassandra Rios, écrivaine étouffée sous la dictature Brésilienne
Alors que le Brésil s’apprête à commémorer le cinquantième anniversaire du putsch militaire (31 mars 1964) qui plongea le pays dans la dictature, un avocat défend la réhabilitation de l’auteure érotique et lesbienne Cassandra Rios, la romancière la plus interdite du Brésil. Celle qui signait ses manuscrits d’un nom d’homme pour tromper les autorités, représente un cas emblématique qui rappelle qu’au delà des persécutions politiques, une féroce censure visait à instaurer un nouvel ordre moral.
Cassandra Rios, “l’écrivain la plus interdite du Brésil” invitée à la télé brésilienne à la fin des années 80, quelques
années après la fin de la dictature.
années après la fin de la dictature.
14.03.2014par Octave Bonnaud
Mars 2002, cimetière de Santo Amaro, Sao Paulo. Alors que la terre recouvre la sépulture de Cassandra Rios (1932-2002), une proche rapporte l’amère leçon de la romancière la plus censurée du Brésil :“lorsqu’un homme écrit, il est sage, compétent. Lorsqu’une femme écrit, c’est une nymphomane, une tarée”.
Mars 2002, cimetière de Santo Amaro, Sao Paulo. Alors que la terre recouvre la sépulture de Cassandra Rios (1932-2002), une proche rapporte l’amère leçon de la romancière la plus censurée du Brésil :“lorsqu’un homme écrit, il est sage, compétent. Lorsqu’une femme écrit, c’est une nymphomane, une tarée”.
Tombée dans l’oubli pendant la dictature (1964-1985), l’auteure érotique fait aujourd’hui l’objet d’une demande de réhabilitation auprès de laCommission Nationale de la Vérité, chargée d’élucider les crimes commis pendant le régime militaire. “La persécution politique subie par Cassandra Rios est liée au fait qu’elle était femme, et qu’elle affichait une attitude sexuelle condamnée par la morale de la dictature militaire”, explique l’avocat Martim Sampaio, qui défend le cas à la demande de la nièce de l’écrivain. Dès les premiers jours de la dictature, des milliers de militants politiques sont emprisonnés, torturés et assassinés.
Rapidement, la doctrine de “sécurité nationale”s’étend aux sphères culturelles, assimilant tout comportement déviant à l’ordre moral prôné par les militaires, à une tentative de subversion. “On était dans une période ou un présentateur de télévision pouvait être licencié car il était jugé trop efféminé, ou l’on pouvait aussi vous faire des problèmes à cause de votre coupe de cheveux, ou des artistes comme Gilberto Gil pouvaient être emprisonnés, sous le prétexte qu’ils fumaient du haschich”, se souvient l’avocat, qui a lui-même milité dans des organisations de défense de la liberté à cette époque.
Une reine du best-seller réduite au silence
De La Nymphette Nicoletta* à Viande en Délire, en passant par Une femme différente ou La Volupté du pêché, son premier roman publié à l’âge de 16 ans, Cassandra Rios enchaîne les succès tout au long des années 50. Ses titres et couvertures suggestives, laissant deviner des scènes de sexe explicites, assurent la renommée sulfureuse de Cassandra Rios. Et des ventes qui dépasseront les 300 000 exemplaires par an, un succès d’édition qui ne sera dépassé que par Paulo Coelho, avec L’alchimiste, des années plus tard…
C’est donc une reine du best-seller que la dictature militaire s’empresse de réduire au silence. A peine deux mois après le coup d’État du 31 mars 1964, un tribunal fait saisir les exemplaires de Viande en délire, Georgette ou Copacabanna Poste 6, vendus lors d’une foire au livre à Belo Horizonte. En 1976, trente trois des trente six livres écrits par Cassandra Rios figurent sur la liste des ouvrages interdits. L’un des censeurs, justifiera en ces termes la prohibition de Copacabana Posto 6, dont le contenu véhiculait à ses yeux : “un message négatif, psychologiquement faux dans certains aspects relationnels, à la fois nuisible et déprimant, surtout à propos de l’histoire lesbienne de l’héroïne avec la belle-mère et le double suicide final qui s’ensuit”, révèle la chercheuse Sandra Reimão, qui a exploré les archives de la dictature. A cette époque, l’appareil de censure interdit avec la même véhémence “Le Kama Sutra”, les écrits de Karl Marx ou d’Henry Miller : un livre sur trois est prohibé par les censeurs de Brasilia.
Rapidement, la doctrine de “sécurité nationale”s’étend aux sphères culturelles, assimilant tout comportement déviant à l’ordre moral prôné par les militaires, à une tentative de subversion. “On était dans une période ou un présentateur de télévision pouvait être licencié car il était jugé trop efféminé, ou l’on pouvait aussi vous faire des problèmes à cause de votre coupe de cheveux, ou des artistes comme Gilberto Gil pouvaient être emprisonnés, sous le prétexte qu’ils fumaient du haschich”, se souvient l’avocat, qui a lui-même milité dans des organisations de défense de la liberté à cette époque.
Une reine du best-seller réduite au silence
De La Nymphette Nicoletta* à Viande en Délire, en passant par Une femme différente ou La Volupté du pêché, son premier roman publié à l’âge de 16 ans, Cassandra Rios enchaîne les succès tout au long des années 50. Ses titres et couvertures suggestives, laissant deviner des scènes de sexe explicites, assurent la renommée sulfureuse de Cassandra Rios. Et des ventes qui dépasseront les 300 000 exemplaires par an, un succès d’édition qui ne sera dépassé que par Paulo Coelho, avec L’alchimiste, des années plus tard…
C’est donc une reine du best-seller que la dictature militaire s’empresse de réduire au silence. A peine deux mois après le coup d’État du 31 mars 1964, un tribunal fait saisir les exemplaires de Viande en délire, Georgette ou Copacabanna Poste 6, vendus lors d’une foire au livre à Belo Horizonte. En 1976, trente trois des trente six livres écrits par Cassandra Rios figurent sur la liste des ouvrages interdits. L’un des censeurs, justifiera en ces termes la prohibition de Copacabana Posto 6, dont le contenu véhiculait à ses yeux : “un message négatif, psychologiquement faux dans certains aspects relationnels, à la fois nuisible et déprimant, surtout à propos de l’histoire lesbienne de l’héroïne avec la belle-mère et le double suicide final qui s’ensuit”, révèle la chercheuse Sandra Reimão, qui a exploré les archives de la dictature. A cette époque, l’appareil de censure interdit avec la même véhémence “Le Kama Sutra”, les écrits de Karl Marx ou d’Henry Miller : un livre sur trois est prohibé par les censeurs de Brasilia.
“Viande en délire”, le destin d’une femme qui choisit de divorcer pour vivre avec son amant et “Je suis lesbienne”, la vie d’une femme qui éprouve une attirance pour les femmes dès son plus jeune âge deux des 36 livres écrits par la Brésilienne Cassandra Rios
Tromper la censure, en étant un homme
C’est pendant ces années de terreur que Cassandra Rios prend le risque de tromper la censure, sans priver ses lecteurs des scènes crues qui ont fait son succès. L’écrivaine sulfureuse présente ses manuscrits sous des pseudonymes masculins, Clarence Rivier et Oliver Rivers, la déclinaison de son nom en anglais et français. Et ça marche : les censeurs ne trouveront plus rien à redire à la lecture des ébats fougueux lesbiens ou hétérosexuels, dès lors qu’ils sont racontés par un homme.
“Le plus incroyable, c’est que même sous un pseudo masculin, elle a continué à avoir du succès auprès d’un public très large d’hommes et de femmes, hétérosexuels ou homosexuels. Sa littérature était populaire et a permis à toute une génération d’adolescents brésiliens de faire leur éducation sexuelle. Ses livres signés sous différents noms se faisaient même concurrence !”, rappelle Hannah Korich, qui a réalisé un documentaire (vidéo en portugais) sur l’écrivaine de Sao Paulo. Parmi ses livres écrits sous pseudo, Je suis une lesbienne, initialement publié dans les années 1980 sous forme de feuilleton dans la revue Status, s’impose comme l’un des plus sulfureux de son époque : il décrit les sentiments troubles d’une fillette de 7 ans pour une adulte, amie de sa mère.
Même si quelques exemplaires des ouvrages interdits continuaient à circuler sous le manteau, l’étau du silence orchestré par la dictature se resserre très rapidement. La presse, ne lui consacre plus aucun article, sauf pour annoncer dans des entrefilets la liste de ces anciens ou nouveaux livres prohibés. Face au risque que représentait la diffusion de ses livres sous pseudos, les éditeurs obligent Cassandra Rios à céder ses droits d’auteurs contre une maigre rémunération fixe.
Un ostracisme, synonyme de ruine financière, qui contraindra l’écrivain à vendre sa librairie, sa maison, sa voiture et même ses bijoux. “Jusqu’à la fin de sa vie, elle a été profondément blessée par la censure. L’injustice est d’autant plus grande que contrairement à d’autres artistes censurés, elle n’a pas réussi à revenir sur le devant de la scène littéraire après la dictature. A la fin de sa vie, elle finançait la publication de ses livres à compte d’auteur et vivait de travaux de traduction ou de révision éditoriale”, raconte la documentariste Hannah Korich.
C’est pendant ces années de terreur que Cassandra Rios prend le risque de tromper la censure, sans priver ses lecteurs des scènes crues qui ont fait son succès. L’écrivaine sulfureuse présente ses manuscrits sous des pseudonymes masculins, Clarence Rivier et Oliver Rivers, la déclinaison de son nom en anglais et français. Et ça marche : les censeurs ne trouveront plus rien à redire à la lecture des ébats fougueux lesbiens ou hétérosexuels, dès lors qu’ils sont racontés par un homme.
“Le plus incroyable, c’est que même sous un pseudo masculin, elle a continué à avoir du succès auprès d’un public très large d’hommes et de femmes, hétérosexuels ou homosexuels. Sa littérature était populaire et a permis à toute une génération d’adolescents brésiliens de faire leur éducation sexuelle. Ses livres signés sous différents noms se faisaient même concurrence !”, rappelle Hannah Korich, qui a réalisé un documentaire (vidéo en portugais) sur l’écrivaine de Sao Paulo. Parmi ses livres écrits sous pseudo, Je suis une lesbienne, initialement publié dans les années 1980 sous forme de feuilleton dans la revue Status, s’impose comme l’un des plus sulfureux de son époque : il décrit les sentiments troubles d’une fillette de 7 ans pour une adulte, amie de sa mère.
Même si quelques exemplaires des ouvrages interdits continuaient à circuler sous le manteau, l’étau du silence orchestré par la dictature se resserre très rapidement. La presse, ne lui consacre plus aucun article, sauf pour annoncer dans des entrefilets la liste de ces anciens ou nouveaux livres prohibés. Face au risque que représentait la diffusion de ses livres sous pseudos, les éditeurs obligent Cassandra Rios à céder ses droits d’auteurs contre une maigre rémunération fixe.
Un ostracisme, synonyme de ruine financière, qui contraindra l’écrivain à vendre sa librairie, sa maison, sa voiture et même ses bijoux. “Jusqu’à la fin de sa vie, elle a été profondément blessée par la censure. L’injustice est d’autant plus grande que contrairement à d’autres artistes censurés, elle n’a pas réussi à revenir sur le devant de la scène littéraire après la dictature. A la fin de sa vie, elle finançait la publication de ses livres à compte d’auteur et vivait de travaux de traduction ou de révision éditoriale”, raconte la documentariste Hannah Korich.
Cassandra Rios, la plus petite au milieu, sur le tournage du film brésilien Anita en 1980
Un second ostracisme
Ses couvertures sensationnalistes, ses récits linéaires et racontés à la première personne, l’ont longtemps déconsidéré aux yeux de la critique littéraire. Seul Jorge Amado, l’auteur du célébrissime “Dona Flor et ses deux maris”, considéré comme le plus grand écrivain brésilien du XXème siècle, prendra sa défense en louant son talent de “grande romancière, ignorée par pur préjugé”.
“Elle n’a pas été soutenue par les intellectuels, qui la considéraient comme une écrivaine d’un genre mineur. Pourtant ses romans ne peuvent pas être considérés comme simplement érotiques, ils présentent une intrigue et des personnages bien construits qui suivent les codes de la littérature populaire. Plutôt que d’écrire des récits sophistiqués destinés aux cercles confidentiels, elle a mis en scène pour la première fois des personnages homosexuels dans la littérature de masse”, rappelle, admirative, Hannah Korich, qui dirige également la maison d’édition Malagueta consacrée à la littérature lesbienne.
Simple fille de boulanger de Sao Paulo, grisée par le succès depuis son plus jeune âge, Cassandra Rios vivra le manque de reconnaissance des milieux littéraires après la dictature comme un second ostracisme. “La dictature lui a tout pris. Elle aurait pu siéger à l’Académie des lettres brésiliennes, vivre confortablement des ventes de ses livres, de sa librairie, et surtout être reconnue comme une véritable écrivaine”, résume Martim Sampaio.
L’avocat souhaite établir lors d’une audience publique, l’ampleur du préjudice moral et financier lié à la censure. Et obtenir “dans une inscription au livre Mémorial qui fera la synthèse des travaux de la Commission vérité, la reconnaissance de la qualité de son œuvre littéraire”. Peut être le début d’une seconde vie, pour celle qui revendiquait, quelques mois avant de s’éteindre dans la solitude, “d’être avant tout née écrivain”.
*les titres brésiliens ont été traduits en français
Ses couvertures sensationnalistes, ses récits linéaires et racontés à la première personne, l’ont longtemps déconsidéré aux yeux de la critique littéraire. Seul Jorge Amado, l’auteur du célébrissime “Dona Flor et ses deux maris”, considéré comme le plus grand écrivain brésilien du XXème siècle, prendra sa défense en louant son talent de “grande romancière, ignorée par pur préjugé”.
“Elle n’a pas été soutenue par les intellectuels, qui la considéraient comme une écrivaine d’un genre mineur. Pourtant ses romans ne peuvent pas être considérés comme simplement érotiques, ils présentent une intrigue et des personnages bien construits qui suivent les codes de la littérature populaire. Plutôt que d’écrire des récits sophistiqués destinés aux cercles confidentiels, elle a mis en scène pour la première fois des personnages homosexuels dans la littérature de masse”, rappelle, admirative, Hannah Korich, qui dirige également la maison d’édition Malagueta consacrée à la littérature lesbienne.
Simple fille de boulanger de Sao Paulo, grisée par le succès depuis son plus jeune âge, Cassandra Rios vivra le manque de reconnaissance des milieux littéraires après la dictature comme un second ostracisme. “La dictature lui a tout pris. Elle aurait pu siéger à l’Académie des lettres brésiliennes, vivre confortablement des ventes de ses livres, de sa librairie, et surtout être reconnue comme une véritable écrivaine”, résume Martim Sampaio.
L’avocat souhaite établir lors d’une audience publique, l’ampleur du préjudice moral et financier lié à la censure. Et obtenir “dans une inscription au livre Mémorial qui fera la synthèse des travaux de la Commission vérité, la reconnaissance de la qualité de son œuvre littéraire”. Peut être le début d’une seconde vie, pour celle qui revendiquait, quelques mois avant de s’éteindre dans la solitude, “d’être avant tout née écrivain”.
*les titres brésiliens ont été traduits en français
“Une femme indépendante, en avance sur son temps”
14.03.2014 – Durée : 6’56propos recueillis par Sylvie BraibantOctave Bonnaud, le correspondant de Terriennes au Brésil, revient sur ce qui le fascine chez cette écrivaine maltraitée par la dictature : la célébrité et l’acharnement des militaires contre cette plume subversive. Aujourd’hui au Brésil, le tabou de l’homosexualité n’est toujours pas levé… Et les préjugés contre les écrivaines résistent encore, malgré une société diverse et en perpétuelle évolution…
http://www.tv5.org/cms/template/image/terriennes/bg-titre-side.gif); background-attachment: scroll; background-color: rgb(0, 124, 182); background-position: 0% 100%; background-repeat: repeat no-repeat;”>La cure gay, sujet d’un roman des années 50
L’œuvre de Cassandra Rios fait aujourd’hui l’objet de nombreux travaux universitaires et de lectures publiques dans les cercles militants féministes et LGBT brésiliens. Souvent cité, le récit d’Eudemonia, publié dans les années 50, trouve un écho particulier : il raconte le destin d’une femme qui se rend volontairement dans une clinique psychiatrique, croyant pouvoir se débarrasser de son attirance pour les femmes.
Un récit d’une actualité étonnante au Brésil, alors qu’une croisade des députés évangélistes tentait en 2013 de faire voter la généralisation des “cures gay”, déjà pratiquée dans les temples évangéliques pour “soigner les homosexuels”. Par la voix de leur leader, le député Marco Feliciano, les évangélistes ont promis de revenir à la charge en 2015, espérant compter sur un plus grand nombre d’élus lors de la prochaine mandature.
Un récit d’une actualité étonnante au Brésil, alors qu’une croisade des députés évangélistes tentait en 2013 de faire voter la généralisation des “cures gay”, déjà pratiquée dans les temples évangéliques pour “soigner les homosexuels”. Par la voix de leur leader, le député Marco Feliciano, les évangélistes ont promis de revenir à la charge en 2015, espérant compter sur un plus grand nombre d’élus lors de la prochaine mandature.
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